L’été est une saison propice aux envenimations ophidiennes (par morsures de serpents) ou par les batraciens, même si le risque existe à d’autres moments de l’année. Les hyménoptères (guêpes, abeilles, bourdons, frelons...) peuvent également causer de gros soucis à nos chiens et chats. Nous allons passer en revue ces trois types d’envenimation, et envisager la conduite à tenir et le traitement pour ces différentes possibilités. Nous abordons ici uniquement les risques en France métropolitaine.

 

 

L’ENVENIMATION OPHIDIENNE (SERPENTS)

 

En France, les serpents venimeux rencontrés sont des vipères, dont seules deux espèces sont dangereuses : Vipera aspis, présente sur une grande partie du territoire sauf l’extrême Nord, et qui apprécie la chaleur, les rochers et les broussailles, et Vipera berus, que l’on peut trouver un peu partout, y compris en montagne jusqu’à 3000 m d’altitude.

Le venin est secrété par les vipères dès leur naissance, et les vipères juvéniles en ont donc moins que les adultes. Lors d’une morsure, tout le venin n’est pas forcément injecté.

C’est un liquide incolore à jaune ambré, qui contient de nombreuses toxines protéiques (hémotoxines -> agissant sur les cellules sanguines, neurotoxines -> agissant sur le système nerveux, myotoxines -> agissant sur les muscles), mais aussi des enzymes, et d’autres substances non protéiques. Les différents constituants du venin interviennent dans sa toxicité : les hyaluronidases favorisent sa diffusion dans l’organisme de l’animal mordu, les autres composants entraînent une forte réaction inflammatoire locale (œdème, rougeur, chaleur) avec destruction des tissus (nécrose), et des globules rouges (hémolyse due aux hémotoxines). On observe également souvent une forte toxicité neuromusculaire.

 

Quels symptômes en cas d’envenimation ?

Les signes cliniques peuvent apparaître entre 30 min et 3 h après la morsure. Généralement, il est possible d’observer sur la peau la trace bien caractéristique des crochets : deux petits points espacés de 0,5 à 1 cm. Localement, on pourra constater la présence d’un œdème, avec chaleur, douleur, et parfois nécrose tissulaire. En cas de morsure à une patte, l’animal peut présenter une boiterie, et une réaction ganglionnaire. Enfin, des signes généraux tels que fièvre, diarrhée, vomissements, hypotension, troubles cardiorespiratoires, convulsions, paralysie... peuvent survenir.

Il est à noter que le chat ne présente généralement que des signes locaux.

 

Que faire en cas de morsure de vipère (suspectée ou avérée) ?

Il faut emmener l’animal le plus rapidement possible chez le vétérinaire. Toutefois, il est important de ne pas stresser l’animal, qui doit être placé au repos dans un endroit calme. De préférence (et si c’est possible), mieux vaut éviter de le faire marcher, afin de ne pas accélérer la diffusion du venin.

 

À ne pas faire :

  • Essayer de retirer le venin avec un Aspivenin®
  • Poser un garrot (cela risque d’aggraver les lésions)
  • Réchauffer le point de morsure (le venin est résistant à la chaleur)

Le vétérinaire hospitalisera vraisemblablement l’animal, en fonction de son état.

Il le placera au calme, immobilisera le membre mordu (s’il s’agit d’un membre), et désinfectera la plaie. Il posera une perfusion, et instaurera a priori une antibiothérapie pour lutter contre les risques d’infections secondaires. Des antalgiques pour lutter contre la douleur, de l’héparine pour prévenir les troubles de la coagulation, et des corticoïdes seront aussi administrés, ainsi que d’autres traitements selon la gravité des symptômes.

Une envenimation ophidienne peut être mortelle !

 

Comment prévenir ?

Mieux vaut tenir en laisse les chiens, notamment jeunes et un peu « fous », lors les promenades dans les lieux à risque, ou au moins les surveiller de près. Frapper régulièrement le sol avec un bâton de marche peut faire fuir les vipères, qui souvent mordent lorsqu’elles sont surprises ou se sentent agressées.

Pour les chats qui se baladent librement, les mesures préventives sont limitées malheureusement.

 

 

L’ENVENIMATION PAR LES BATRACIENS (CRAPAUDS)

 

L’intoxication par le venin de crapaud est relativement fréquente, notamment chez les jeunes chiens joueurs et curieux. Et l’évolution peut être fatale !

 

Les crapauds possèdent des glandes granuleuses à la surface de leur peau, dans lesquelles est produit un venin. Les plus « chargées » en venin sont situées en arrière de la tête du crapaud, et constituent pour lui un mécanisme de défense passive : elles libèrent spontanément leur venin lorsque le corps du crapaud subit une pression excessive, par exemple lorsqu’un chien mord le crapaud.

Le venin comprend un ensemble de molécules toxiques, qui possèdent des propriétés irritantes pour les muqueuses, mais qui ont aussi des effets sur le cœur, les vaisseaux sanguins, le système nerveux. Certaines toxines sont même hallucinogènes.

Un chien qui prend le crapaud pour une proie ou un jouet l’attrape dans sa gueule, et est alors exposé directement au venin libéré, rapidement absorbé par les muqueuses buccale et digestive. Les chats, plus méfiants, ne sont que très peu concernés par ce type d’envenimation.

La plupart du temps, les intoxications par le venin de crapaud ont lieu entre le printemps et le début de l’automne, avec un pic en été.

NB : toucher un crapaud n’est pas dangereux pour l’homme, surtout si l’on n’exerce pas de pression. Le venin ne traverse pas la peau, mais il sera nécessaire de bien se laver les mains après.

 

Quels symptômes lors d’envenimation par un crapaud ?

Contrairement à l’envenimation ophidienne, les symptômes apparaissent ici quasi instantanément, dès que le chien prend le crapaud dans sa gueule, car la libération du venin est immédiate. Le premier signe clinique est l’hypersalivation, due à une très forte inflammation de la gueule et du pharynx, et qui peut durer jusqu’à 12 heures. Le chien présente également une anorexie pendant environ 48h.

Si l’envenimation est minime, il est possible que tout rentre dans l’ordre après cet épisode.

Face à un chien (ou un chat) qui sort en extérieur et présente une salivation excessive, l’intoxication par le venin de crapaud doit faire partie du diagnostic différentiel. En tout état de cause, ne pas hésiter à consulter un vétérinaire en urgence !

Si l’envenimation est plus sévère, des troubles digestifs (vomissements, diarrhée, douleurs abdominales) peuvent apparaître environ 24h après l’intoxication par le venin, associés à d’autres signes généraux : abattement, fièvre, difficultés respiratoires, démarche inhabituelle, tremblements / convulsions... Des troubles cardiaques peuvent aussi être détectés à l’auscultation.

Le pronostic vital est alors réservé, notamment si le chien est jeune et/ou de petite taille. La mort peut parfois survenir en moins de 24h.

 

Que faire en cas de suspicion d’envenimation par un crapaud ?

Tout contact de la gueule d’un animal avec un crapaud nécessite une consultation d’urgence chez le vétérinaire. Il est conseillé de rincer longuement la bouche avec de l’eau (jet, gourde). Si l’œil a reçu du venin, le rincer avec du sérum physiologique.

Le vétérinaire rincera la gueule de l’animal avec une solution de bicarbonate de soude (pour neutraliser l’acidité du venin), le placera sous perfusion, et lui administrera un traitement de soutien (corticoïdes, antihistaminiques, pansement gastrique...) tout en surveillant de près la fonction cardiaque, car la décompensation peut parfois être brutale.

L’évolution dépendra essentiellement de la quantité de venin ingérée, de la rapidité de la prise en charge médicale, et de la taille de l’animal.

 

Comment prévenir ?

Le pronostic étant relativement sombre, l’idéal est d’éviter tout contact de l’animal avec un crapaud, et donc, dans la mesure du possible, de garder chiens et chats à l’intérieur la nuit.

 

 

LES INTOXICATIONS PAR LES HYMÉNOPTÈRES

 

Les intoxications par les guêpes, bourdons, abeilles, frelons, sont elles aussi fréquentes en été. C’est souvent la quantité de piqûres qui fait la gravité ; une vingtaine de guêpes peuvent tuer un chien de 5 kg, essentiellement par choc anaphylactique (choc allergique).

Le venin se situe dans le dard des femelles ; abeilles et bourdons perdent leur aiguillon après piqûre, et meurent, contrairement aux guêpes et aux frelons. Le venin des hyménoptères est constitué de nombreuses enzymes, peptides et amines. Son inoculation par piqûre entraîne une libération d’histamine, qui provoque une inflammation importante, avec douleur, œdème, démangeaisons, destruction des globules rouges et diminution des capacités de coagulation du sang.

 

Quels symptômes en cas de piqûre(s) d’hyménoptères ?

La plupart du temps, douleur, œdème, rougeur, papules peuvent apparaître à l’endroit de la piqûre. S’il s’agit d’une abeille ou d’un bourdon, il est possible d’y retrouver le dard.

Des signes généraux peuvent être observés : fièvre, contractions musculaires, paralysie...

En cas de piqûre dans la bouche, ou près d’un vaisseau, ou encore si l’animal est allergique ou subit l’attaque d’un essaim (piqûres multiples), il y a risque important de choc anaphylactique : c’est une réaction allergique exacerbée, se traduisant à la fois par des symptômes cutanés, mais aussi par des troubles respiratoires et cardiaques, voire digestifs, pouvant entraîner la mort à tout moment.

 

Que faire si votre animal a été piqué par un hyménoptère ?

Si votre chien ou chat s’est fait piquer par un hyménoptère, mieux vaut contacter rapidement le vétérinaire ; en attendant de vous y rendre, vous pouvez éventuellement retirer le dard s’il est présent. Le venin des hyménoptères étant thermosensible (détruit par la chaleur), il est possible d’approcher une source de chaleur (par exemple extrémité incandescente d’une cigarette) du lieu de piqûre, à condition toutefois que votre animal soit très calme et ne bouge pas pour ne pas le brûler. Si c’est trop hasardeux, désinfectez juste la plaie, et faites un pansement humide avec du vinaigre (piqûre de guêpe).

Le vétérinaire quant à lui pourra donner des antihistaminiques, ou prescrire des corticoïdes.

Si l’animal est en état de choc, il sera hospitalisé et mis sous perfusion, et les fonctions cardiaque et respiratoire étroitement surveillées. En effet, notamment en cas de piqûres multiples, l’évolution peut être rapide et conduire à la mort.

 

Comment prévenir ?

Il peut être compliqué de prévenir les piqûres d’hyménoptères, car ces insectes sont nombreux l’été, et les animaux aiment souvent jouer avec eux, plus particulièrement les chatons et les chiots.

Afin d’éviter les piqûres dans la bouche ou la gorge, il est conseillé de ne pas nourrir son animal à l’extérieur, d’autant que les guêpes et frelons sont souvent attirés par des odeurs présentes sur les animaux ou dans les gamelles.

Il est également conseillé de se débarrasser des nids d’hyménoptères, pour la sécurité de tous.

 

 

CONCLUSION

 

L’été est loin d’être la saison la moins risquée pour nos animaux domestiques, et même en vacances, il est essentiel de rester vigilant !

 

Rédigé par : Isabelle Mennecier - Docteur Vétérinaire

15/09/2021